Les lettres de mon moulin d' Alphonse Daudet
La chèvre de monsieur Seguin
Pendant ces trêves d'une minute, la gourmande cueillait en hâte encore un brin de sa chère herbe; puis elle retournait au combat, la bouche pleine... Cela dura toute la nuit. De temps en temps la chèvre de monsieur Seguin regardait les étoiles danser dans le ciel clair, et elle disait:
"Oh! pourvu que je tienne jusqu'à l'aube..."
L'une après l'autre, les étoiles s'éteignirent. Blanquette redoubla de coups de cornes, le loup de coups de dents... Une lueur pâle parut à l'horizon... Le chant du coq enroué monta d'une métairie.
"Enfin! " dit la pauvre bête, qui n'attendait plus que le jour pour mourir; et elle s'allongea par terre dans sa belle fourrure blanche toute tachée de sang...
Alors le loup se jeta sur la petite chèvre et la mangea.
Adieu, Gringoire!
L'histoire que tu as entendue n'est pas un conte de mon invention. Si jamais tu viens en Provence, nos ménagers te parleront souvent de la "cabro de moussu Seguin, que se battégué touto la niue emé lou loup, e piei lou main lou loup la mangé."
Tu m'entends bien, Gringoire:
"E piei lou matin lou loup la mangé."
ménager=petit exploitant agricole terme dialectal)
Daudet écrit la fin en occitan, le patois provençal: la chèvre de monsieur Seguin, qui se battit toute la nuit avec le loup, et puis, le matin, le loup la mangea.
La chèvre de monsieur Seguin
Pendant ces trêves d'une minute, la gourmande cueillait en hâte encore un brin de sa chère herbe; puis elle retournait au combat, la bouche pleine... Cela dura toute la nuit. De temps en temps la chèvre de monsieur Seguin regardait les étoiles danser dans le ciel clair, et elle disait:
"Oh! pourvu que je tienne jusqu'à l'aube..."
L'une après l'autre, les étoiles s'éteignirent. Blanquette redoubla de coups de cornes, le loup de coups de dents... Une lueur pâle parut à l'horizon... Le chant du coq enroué monta d'une métairie.
"Enfin! " dit la pauvre bête, qui n'attendait plus que le jour pour mourir; et elle s'allongea par terre dans sa belle fourrure blanche toute tachée de sang...
Alors le loup se jeta sur la petite chèvre et la mangea.
Adieu, Gringoire!
L'histoire que tu as entendue n'est pas un conte de mon invention. Si jamais tu viens en Provence, nos ménagers te parleront souvent de la "cabro de moussu Seguin, que se battégué touto la niue emé lou loup, e piei lou main lou loup la mangé."
Tu m'entends bien, Gringoire:
"E piei lou matin lou loup la mangé."
ménager=petit exploitant agricole terme dialectal)
Daudet écrit la fin en occitan, le patois provençal: la chèvre de monsieur Seguin, qui se battit toute la nuit avec le loup, et puis, le matin, le loup la mangea.
Dernière édition par Yves le Ven 28 Avr - 7:35, édité 2 fois