Les Lettres de mon moulin d' Alphonse Daudet
La légende de l'homme à la cervelle d'or
Eh bien, non! je suis encore trop près de Paris. Tous les jours, jusque dans mes pins, il m'envoie les éclaboussures de ses tristesses... A l'heure même où j'écris ces lignes, je viens d'apprendre la mort misérable du pauvre Charles Barbara, et mon moulin en est tout en deuil. Adieu les courlis et le cigales! Je n'ai plus le coeur à rien de gai... Voilà pourquoi, madame, au lieu du joli conte badin que je m'étais promis de vous faire, vous n'aurez encore aujourd'hui qu'une légende mélancolique.
Il était une fois un homme qui avait une cervelle d'or; oui, madame, une cervelle tout en or. Lorsqu'il vint au monde, les médecins pensaient que cet enfant ne vivrait pas, tant sa tête était lourde et son crâne démesuré. Il vécut cependant et grandit au soleil comme un beau plant d'olivier; seulement sa grosse tête l'entraînait toujours, et c'était pitié de le voir se cogner à tous les meubles en marchant... Il tombait souvent.
Charles Barbara (1822-1866), ancien chroniqueur à la Revue de Paris, était devenu fou et venait de se donner la mort le 16 septembre, cinq jours avant la publication de ce conte dans l' Evénement: Daudet joue sur un effet d'actualité.
La légende de l'homme à la cervelle d'or
Eh bien, non! je suis encore trop près de Paris. Tous les jours, jusque dans mes pins, il m'envoie les éclaboussures de ses tristesses... A l'heure même où j'écris ces lignes, je viens d'apprendre la mort misérable du pauvre Charles Barbara, et mon moulin en est tout en deuil. Adieu les courlis et le cigales! Je n'ai plus le coeur à rien de gai... Voilà pourquoi, madame, au lieu du joli conte badin que je m'étais promis de vous faire, vous n'aurez encore aujourd'hui qu'une légende mélancolique.
Il était une fois un homme qui avait une cervelle d'or; oui, madame, une cervelle tout en or. Lorsqu'il vint au monde, les médecins pensaient que cet enfant ne vivrait pas, tant sa tête était lourde et son crâne démesuré. Il vécut cependant et grandit au soleil comme un beau plant d'olivier; seulement sa grosse tête l'entraînait toujours, et c'était pitié de le voir se cogner à tous les meubles en marchant... Il tombait souvent.
Charles Barbara (1822-1866), ancien chroniqueur à la Revue de Paris, était devenu fou et venait de se donner la mort le 16 septembre, cinq jours avant la publication de ce conte dans l' Evénement: Daudet joue sur un effet d'actualité.