Le château de ma mère de Marcel Pagnol
Lorsque soufflait le vent des Demoiselles, alors c'était vraiment de la musique. On entendait des choeurs de dames habillées comme des marquises, qui se faisaient des révérences. Ensuite une flûte de verre, fine et pointue accompagnait, là-haut, dans les nuages, la voix d'une petite fille qui chantait au bord d'un ruisseau.
Mo cher Lili ne voyait rien, et quand la petite fille chantait, il croyait que c'était une grive, ou quelquefois, un ortolan. Mais ce n'était pas de sa faute si son oreille était aveugle, et je l'admirais toujours autant.
En échange de tant de secrets, je lui racontais la ville: les magasins où l'on trouve de tout, les expositions de jouets à la Noël, les retraites aux flambeaux du 141 ème, et la féerie de Magic-City, où j'étais monté sur les montagnes russes: j'imitais le roulement des roues de fonte sur les rails, les cris stridents des passagères, et Lili criait avec moi...
D'autre part, j'avais constaté que dans son ignorance, il me considérait comme un savant: je m'efforçai de justifier cette opinion - si opposée à celle de mon père - par des prouesses de calcul mental, d'ailleurs soigneusement préparées: c'est à lui que je dois d'avoir appris la table de multiplication jusqu'à treize fois treize.
retraite aux flambeaux= ici, défilé du 141 ème régiment, à la lueur des torches
montagnes russes= manège aérien mouvementé
Lorsque soufflait le vent des Demoiselles, alors c'était vraiment de la musique. On entendait des choeurs de dames habillées comme des marquises, qui se faisaient des révérences. Ensuite une flûte de verre, fine et pointue accompagnait, là-haut, dans les nuages, la voix d'une petite fille qui chantait au bord d'un ruisseau.
Mo cher Lili ne voyait rien, et quand la petite fille chantait, il croyait que c'était une grive, ou quelquefois, un ortolan. Mais ce n'était pas de sa faute si son oreille était aveugle, et je l'admirais toujours autant.
En échange de tant de secrets, je lui racontais la ville: les magasins où l'on trouve de tout, les expositions de jouets à la Noël, les retraites aux flambeaux du 141 ème, et la féerie de Magic-City, où j'étais monté sur les montagnes russes: j'imitais le roulement des roues de fonte sur les rails, les cris stridents des passagères, et Lili criait avec moi...
D'autre part, j'avais constaté que dans son ignorance, il me considérait comme un savant: je m'efforçai de justifier cette opinion - si opposée à celle de mon père - par des prouesses de calcul mental, d'ailleurs soigneusement préparées: c'est à lui que je dois d'avoir appris la table de multiplication jusqu'à treize fois treize.
retraite aux flambeaux= ici, défilé du 141 ème régiment, à la lueur des torches
montagnes russes= manège aérien mouvementé
Dernière édition par Yves le Sam 5 Déc - 0:56, édité 1 fois