Le château de ma mère de Marcel Pagnol
Chapitre 5
En arrivant au Petit-Oeil, nous trouvâmes, pris au premier piège, un pinson.
Paul le dégagea aussitôt, le regarda un instant, fondit en larmes, en criant d'une voix étranglée:
"Il est mort! il est mort!
-Mais bien sûr, dit Lili. Les pièges, ça les tue!
-Je ne veux pas, je ne veux pas! il faut le démourir!..."
Il essaya de souffler dans le bec de l'oiseau, puis le lança en l'air pour aider son essor... Mais le pauvre pinson retomba lourdement, comme s'il n'avait jamais eu d'ailes... Alors le petit Paul ramassa des pierres, et se mit à nous les lancer dans un tel état de rage que je dus le prendre dans mes bras, et le rapporter à la maison.
Je fis part à ma mère du regret que j'avais de l'abandonner.
"Ne t'inquiète pas pour lui, me dit-elle. Il adore sa petite soeur, et il a beaucoup de patience avec elle: il s'en occupe toute la journée. N'est-ce pas, Paul?
-Oh! oui, maman! "
Il s'en occupait, en effet.
Dans les fins cheveux frisés, il accrochait une poignée de cigales et les insectes captifs vrombissaient autour de la tête enfantine, qui riait, pâle de terreur; ou bien, il l'installait, à deux mètres du sol, dans la fourche d'un olivier, et feignait ensuite de l'abandonner à son triste sort;
démourir ce verbe n'existe pas, mais le petit Paul n'a pas encore assez de vocabulaire dans la tête.
Chapitre 5
En arrivant au Petit-Oeil, nous trouvâmes, pris au premier piège, un pinson.
Paul le dégagea aussitôt, le regarda un instant, fondit en larmes, en criant d'une voix étranglée:
"Il est mort! il est mort!
-Mais bien sûr, dit Lili. Les pièges, ça les tue!
-Je ne veux pas, je ne veux pas! il faut le démourir!..."
Il essaya de souffler dans le bec de l'oiseau, puis le lança en l'air pour aider son essor... Mais le pauvre pinson retomba lourdement, comme s'il n'avait jamais eu d'ailes... Alors le petit Paul ramassa des pierres, et se mit à nous les lancer dans un tel état de rage que je dus le prendre dans mes bras, et le rapporter à la maison.
Je fis part à ma mère du regret que j'avais de l'abandonner.
"Ne t'inquiète pas pour lui, me dit-elle. Il adore sa petite soeur, et il a beaucoup de patience avec elle: il s'en occupe toute la journée. N'est-ce pas, Paul?
-Oh! oui, maman! "
Il s'en occupait, en effet.
Dans les fins cheveux frisés, il accrochait une poignée de cigales et les insectes captifs vrombissaient autour de la tête enfantine, qui riait, pâle de terreur; ou bien, il l'installait, à deux mètres du sol, dans la fourche d'un olivier, et feignait ensuite de l'abandonner à son triste sort;
démourir ce verbe n'existe pas, mais le petit Paul n'a pas encore assez de vocabulaire dans la tête.