Le château de ma mère de Marcel Pagnol
Chapitre 16
En classe, quand M. Besson, du bout d'une longue règle, suivait sur la carte murale las méandres d'un fleuve inutile, le grand figuier du jas de Baptiste surgissait lentement du mur; au-dessus de la masse des feuilles vernies s' élançait la haute branche morte, et au bout, tout au bout, blanche et noire, une pie.
Alors, une douleur très douce élargissait mon coeur d'enfant, et pendant que la voix lointaine récitait des noms d'affluents, j'essayais de mesurer l'éternité qui me séparait de la Noël. Je comptais les jours, puis les heures, puis j'en retranchais le temps du sommeil, et par la fenêtre, à travers la brume légère du matin d'hiver, je regardais la pendule de l'école: sa grande aiguille avançait par saccades, et je voyais tomber les petites minutes comme des fourmis décapitées.
Chapitre 16
En classe, quand M. Besson, du bout d'une longue règle, suivait sur la carte murale las méandres d'un fleuve inutile, le grand figuier du jas de Baptiste surgissait lentement du mur; au-dessus de la masse des feuilles vernies s' élançait la haute branche morte, et au bout, tout au bout, blanche et noire, une pie.
Alors, une douleur très douce élargissait mon coeur d'enfant, et pendant que la voix lointaine récitait des noms d'affluents, j'essayais de mesurer l'éternité qui me séparait de la Noël. Je comptais les jours, puis les heures, puis j'en retranchais le temps du sommeil, et par la fenêtre, à travers la brume légère du matin d'hiver, je regardais la pendule de l'école: sa grande aiguille avançait par saccades, et je voyais tomber les petites minutes comme des fourmis décapitées.