Le temps des secrets de Marcel Pagnol
Chapitre 6
La famille épouvantée attendit toute la journée. Il ne rentra que fort tard, mais sans rapporter sous son bras le moindre morceau du traître: ce misérable était parti pour la Bretagne. Mon grand-père, qui croyait que cette province nordique ressemblait au Groënland, se consola par l'idée que le climat polaire en viendrait à bout avant la fin de l'année. Il ne parla donc plus jamais de ce malheureux mort de froid. Mais la grand-mère commença une comédie qui devait durer quarante ans.
Le matin, vers les cinq heures, pendant qu'il buvait son café, ou le soir, sur l'oreiller, elle amenait tout doucement la conversation sur la ville de Paris (est-ce que c'est vrai qu'il pleut tous les jours?, sur les clochetons (quel genre de pierre c'était?), sur la beauté du compagnonnage (c'est vraiment une grande famille) - et le grand-père, tout surpris, se trouvait en train de parler de la mère des compagnons.
Chapitre 6
La famille épouvantée attendit toute la journée. Il ne rentra que fort tard, mais sans rapporter sous son bras le moindre morceau du traître: ce misérable était parti pour la Bretagne. Mon grand-père, qui croyait que cette province nordique ressemblait au Groënland, se consola par l'idée que le climat polaire en viendrait à bout avant la fin de l'année. Il ne parla donc plus jamais de ce malheureux mort de froid. Mais la grand-mère commença une comédie qui devait durer quarante ans.
Le matin, vers les cinq heures, pendant qu'il buvait son café, ou le soir, sur l'oreiller, elle amenait tout doucement la conversation sur la ville de Paris (est-ce que c'est vrai qu'il pleut tous les jours?, sur les clochetons (quel genre de pierre c'était?), sur la beauté du compagnonnage (c'est vraiment une grande famille) - et le grand-père, tout surpris, se trouvait en train de parler de la mère des compagnons.