Les lettres de mon moulin d'Alphonse Daudet
Les étoiles
Du temps que je gardais les bêtes sur le Lubéron, je restais des semaines entières sans voir âme qui vive, seul dans le pâturage avec mon chien Labri et mes ouailles. De temps en temps, l'ermite du mont-de-l'Ure passait par là pour chercher des simples ou bien j'apercevais la face noire de quelque charbonnier du Piémont; mais c'étaient des gens naïfs, silencieux à force de solitude, ayant perdu le goût de parler et ne sachant rien de ce qui se disait en bas dans les villages et les villes. Aussi, tous les quinze jours, lorsque j'entendais, sur le chemin qui monte, les sonnailles du mulet de notre ferme m'apportant les provisions de quinzaine, et que je voyais apparaître peu à peu, au-dessus de la côte, la tête éveillée du petit miarro (garçon de ferme) ou la coiffe rousse de la vieille tante Norade, j'étais vraiment bien heureux. Je me faisais raconter les nouvelles du pays d'en bas, les baptêmes, les mariages; mais ce qui m'intéressait surtout, c'était de savoir ce que devenait la fille de mes maîtres, notre demoiselle Stéphanette, la plus jolie qu'il y eût à dix lieues à la ronde.
Les étoiles= ce récit a paru d'abord dans le journal Le Bien Public le 8 Avril 1873. Ultérieurement il fut retiré pour être joint à l'édition définitive des Lettres de mon moulin. (1879)
Labri= le terme labri peut être aussi bien un nom propre qu'un nom commun désignant une race de chien de berger des Pyrénées.
Mont-de-l'Ure= point culminant d'une chaîne de montagnes au sud-est de Sisteron.
Piémont= ce détail renvoie le lecteur à une époque antérieure à l'unification de l'Italie (1870). La Provence était alors limitrophe du royaume de Piémont-Sardaigne, dont les habitants s'expatriaient en assez grand nombre pour trouver du travail en France.
naïfs=le mot est pris au sens de simple, naturel.
Les étoiles
Du temps que je gardais les bêtes sur le Lubéron, je restais des semaines entières sans voir âme qui vive, seul dans le pâturage avec mon chien Labri et mes ouailles. De temps en temps, l'ermite du mont-de-l'Ure passait par là pour chercher des simples ou bien j'apercevais la face noire de quelque charbonnier du Piémont; mais c'étaient des gens naïfs, silencieux à force de solitude, ayant perdu le goût de parler et ne sachant rien de ce qui se disait en bas dans les villages et les villes. Aussi, tous les quinze jours, lorsque j'entendais, sur le chemin qui monte, les sonnailles du mulet de notre ferme m'apportant les provisions de quinzaine, et que je voyais apparaître peu à peu, au-dessus de la côte, la tête éveillée du petit miarro (garçon de ferme) ou la coiffe rousse de la vieille tante Norade, j'étais vraiment bien heureux. Je me faisais raconter les nouvelles du pays d'en bas, les baptêmes, les mariages; mais ce qui m'intéressait surtout, c'était de savoir ce que devenait la fille de mes maîtres, notre demoiselle Stéphanette, la plus jolie qu'il y eût à dix lieues à la ronde.
Les étoiles= ce récit a paru d'abord dans le journal Le Bien Public le 8 Avril 1873. Ultérieurement il fut retiré pour être joint à l'édition définitive des Lettres de mon moulin. (1879)
Labri= le terme labri peut être aussi bien un nom propre qu'un nom commun désignant une race de chien de berger des Pyrénées.
Mont-de-l'Ure= point culminant d'une chaîne de montagnes au sud-est de Sisteron.
Piémont= ce détail renvoie le lecteur à une époque antérieure à l'unification de l'Italie (1870). La Provence était alors limitrophe du royaume de Piémont-Sardaigne, dont les habitants s'expatriaient en assez grand nombre pour trouver du travail en France.
naïfs=le mot est pris au sens de simple, naturel.