Les lettres de mon moulin d' Alphonse Daudet
Les étoiles.
"Alors, c'est ici que tu vis, mon pauvre berger? Comme tu dois t'ennuyer d'être toujours seul! Qu'est-ce que tu fais? A quoi penses-tu?..."
J'avais envie de répondre:" A vous, maîtresse", et je n'aurais pas menti; mais mon trouble était si grand que je ne pouvais pas seulement trouver une parole. Je crois bien qu'elle s'en apercevait, et que la méchante prenait plaisir à redoubler mon embarras avec ses malices:
"Et ta bonne amie, berger, est-ce qu'elle monte te voir quelquefois?... Ca doit être bien sûr la chèvre d'or, ou cette fée Estérelle qui ne court qu'à la pointe des montagnes..."
Et elle-même, en me parlant, avait bien l'air de la fée Estérelle, avec le joli sourire de sa tête renversée et sa hâte de s'en aller qui faisait de sa visite une apparition.
"Adieu, berger.
-Salut, maîtresse."
Et la voilà partie, emportant ses corbeilles vides.
Lorsqu'elle disparut dans le sentier en pente, il me semblait que les cailloux, roulant sous les sabots de la mule, me tombaient un à un sur le coeur. Je les entendais longtemps, longtemps; et jusqu'à la fin du jour je restai comme ensommeillé, n'osant bouger, de peur de faire en aller mon rêve.
Les étoiles.
"Alors, c'est ici que tu vis, mon pauvre berger? Comme tu dois t'ennuyer d'être toujours seul! Qu'est-ce que tu fais? A quoi penses-tu?..."
J'avais envie de répondre:" A vous, maîtresse", et je n'aurais pas menti; mais mon trouble était si grand que je ne pouvais pas seulement trouver une parole. Je crois bien qu'elle s'en apercevait, et que la méchante prenait plaisir à redoubler mon embarras avec ses malices:
"Et ta bonne amie, berger, est-ce qu'elle monte te voir quelquefois?... Ca doit être bien sûr la chèvre d'or, ou cette fée Estérelle qui ne court qu'à la pointe des montagnes..."
Et elle-même, en me parlant, avait bien l'air de la fée Estérelle, avec le joli sourire de sa tête renversée et sa hâte de s'en aller qui faisait de sa visite une apparition.
"Adieu, berger.
-Salut, maîtresse."
Et la voilà partie, emportant ses corbeilles vides.
Lorsqu'elle disparut dans le sentier en pente, il me semblait que les cailloux, roulant sous les sabots de la mule, me tombaient un à un sur le coeur. Je les entendais longtemps, longtemps; et jusqu'à la fin du jour je restai comme ensommeillé, n'osant bouger, de peur de faire en aller mon rêve.