Les Lettre de mon moulin d' Alphonse Daudet
Le phare des Sanguinaires
"Tout à coup, voilà mon camarade qui s'arrête de manger, me regarde un moment avec de drôles d'yeux, et plouf! tombe sur la table, les bras en avant. Je vais à lui, je le secoue, je l'appelle:
Oh! Tché!... Oh! Tché!...
Rien, il était mort... Vous jugez quelle émotion. Je restai plus d'une heure stupide et tremblant devant ce cadavre, puis, subitement cette idée me vient:" Et le phare!" Je n'eus que le temps de monter dans la lanterne et d'allumer. La nuit était déjà là... Quelle nuit, monsieur! La mer, le vent, n'avaient plus leur voix naturelle. A tout moment il me semblait que quelqu'un m'appelait dans l'escalier. Avec cela une fièvre, une soif! Mais vous ne m'auriez pas fait descendre... j'avais trop peur du mort. Pourtant, au petit jour, le courage me revint un peu. Je portai mon camarade sur son lit; un drap dessus, un bout de prière, et puis vite aux signaux d'alarme.
Malheureusement, la mer était grosse; j'eus beau appeler, appeler, personne ne vint... Me voilà seul dans le phare avec mon pauvre Tchéco, et Dieu sait pour combien de temps... J'espérais pouvoir le garder près de moi jusqu'à l'arrivée du bateau! mais au bout de trois jours ce n'était plus possible... Comment faire? le porter dehors? l'enterrer? La roche était trop dure, et il y a tant de corbeaux dans l'île."
Le phare des Sanguinaires
"Tout à coup, voilà mon camarade qui s'arrête de manger, me regarde un moment avec de drôles d'yeux, et plouf! tombe sur la table, les bras en avant. Je vais à lui, je le secoue, je l'appelle:
Oh! Tché!... Oh! Tché!...
Rien, il était mort... Vous jugez quelle émotion. Je restai plus d'une heure stupide et tremblant devant ce cadavre, puis, subitement cette idée me vient:" Et le phare!" Je n'eus que le temps de monter dans la lanterne et d'allumer. La nuit était déjà là... Quelle nuit, monsieur! La mer, le vent, n'avaient plus leur voix naturelle. A tout moment il me semblait que quelqu'un m'appelait dans l'escalier. Avec cela une fièvre, une soif! Mais vous ne m'auriez pas fait descendre... j'avais trop peur du mort. Pourtant, au petit jour, le courage me revint un peu. Je portai mon camarade sur son lit; un drap dessus, un bout de prière, et puis vite aux signaux d'alarme.
Malheureusement, la mer était grosse; j'eus beau appeler, appeler, personne ne vint... Me voilà seul dans le phare avec mon pauvre Tchéco, et Dieu sait pour combien de temps... J'espérais pouvoir le garder près de moi jusqu'à l'arrivée du bateau! mais au bout de trois jours ce n'était plus possible... Comment faire? le porter dehors? l'enterrer? La roche était trop dure, et il y a tant de corbeaux dans l'île."