Les Lettres de mon moulin d' Alphonse Daudet
L'élixir du révérend père Gaucher,
Alors, à bout de forces, il se laissait tomber dans un grand fauteuil, et, le corps abandonné, la paupière à demi-close, il dégustait son péché par petits coups, en se disant tout bas avec un remords délicieux:
"Ah! je me damne... je me damne..."
Le plus terrible, c'est qu'au fond de cet élixir diabolique, il retrouvait, par je ne sais quel sortilège, toutes les vilaines chansons de tante Bégon: Ce sont trois petites commères, qui parlent de faire un banquet... ou: Bergerette de maître André s'en va-t-au bois seulette... et toujours la fameuse des pères blancs : Patatin patatan.
Pensez quelle confusion le lendemain, quand ses voisins de cellule lui faisaient d'un air malin:
"Eh! eh! père Gaucher, vous aviez des cigales en tête, hier soir en vous couchant."
Alors c'étaient des larmes, des désespoirs, et le jeûne, et le cilice, et la discipline.
L'élixir du révérend père Gaucher,
Alors, à bout de forces, il se laissait tomber dans un grand fauteuil, et, le corps abandonné, la paupière à demi-close, il dégustait son péché par petits coups, en se disant tout bas avec un remords délicieux:
"Ah! je me damne... je me damne..."
Le plus terrible, c'est qu'au fond de cet élixir diabolique, il retrouvait, par je ne sais quel sortilège, toutes les vilaines chansons de tante Bégon: Ce sont trois petites commères, qui parlent de faire un banquet... ou: Bergerette de maître André s'en va-t-au bois seulette... et toujours la fameuse des pères blancs : Patatin patatan.
Pensez quelle confusion le lendemain, quand ses voisins de cellule lui faisaient d'un air malin:
"Eh! eh! père Gaucher, vous aviez des cigales en tête, hier soir en vous couchant."
Alors c'étaient des larmes, des désespoirs, et le jeûne, et le cilice, et la discipline.