Le château de ma mère de Marcel Pagnol
Chapitre 11
Les chasseurs étaient partis pour Pichauris, assez dépités de notre défection. Lili déjeuna à la maison, avec ma tante, ma mère, la petite soeur et Paul.
Il était grave, j'affectais une gaieté bruyante, ce qui fit grand plaisir à ma chère maman. Je la regardais avec tendresse, mais j'étais parfaitement décidé à la quitter la nuit suivante.
Je me suis souvent demandé comment j'avais pu prendre sans l'ombre d'un remords, et sans la moindre inquiétude, une résolution pareille: je ne le comprends qu'aujourd'hui.
Jusqu'à la triste puberté, le monde des enfants n'est pas le nôtre: ils possèdent le don merveilleux d'ubiquité.
Chaque jour, pendant que je déjeunais à la table de famille, je courais aussi dans la colline, et je dégageais d'un piège un merle encore chaud.
Ce buisson, ce merle, et ce piège étaient pour moi aussi réels que cette toile cirée, ce café au lait, ce portrait de M. Fallières qui souriait vaguement sur le mur.
Chapitre 11
Les chasseurs étaient partis pour Pichauris, assez dépités de notre défection. Lili déjeuna à la maison, avec ma tante, ma mère, la petite soeur et Paul.
Il était grave, j'affectais une gaieté bruyante, ce qui fit grand plaisir à ma chère maman. Je la regardais avec tendresse, mais j'étais parfaitement décidé à la quitter la nuit suivante.
Je me suis souvent demandé comment j'avais pu prendre sans l'ombre d'un remords, et sans la moindre inquiétude, une résolution pareille: je ne le comprends qu'aujourd'hui.
Jusqu'à la triste puberté, le monde des enfants n'est pas le nôtre: ils possèdent le don merveilleux d'ubiquité.
Chaque jour, pendant que je déjeunais à la table de famille, je courais aussi dans la colline, et je dégageais d'un piège un merle encore chaud.
Ce buisson, ce merle, et ce piège étaient pour moi aussi réels que cette toile cirée, ce café au lait, ce portrait de M. Fallières qui souriait vaguement sur le mur.